Le Royaume-Uni a informé le 29 mars 2017 le Conseil européen de son intention de quitter l’UE en invoquant l’article 50 du Traité sur l’Union européenne.
Art. 50 TUE : 1. Tout État membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles, de se retirer de l’Union.
- L’État membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen.
À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec cet État un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à l’article 218, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen.
3. Les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai.
Le 10 avril 2019, les dirigeants des 27 pays de l’UE sont convenus de reporter le Brexit au 31 octobre 2019, leur décision ayant été prise en accord avec le Royaume-Uni. Les dirigeants de l’UE des 27 avaient pris note de la lettre envoyée par le Premier Ministre britannique, demandant une nouvelle extension du délai visé à l’article 50. Les dirigeants avaient accepté cette prorogation afin de permettre la ratification d’un accord de retrait.
Le 17 octobre 2019, L’Europe et la Grande Bretagne sont tombés d’accord sur la sortie définitive de la Grande Bretagne de l’Union Européenne (BREXIT). Les négociateurs se sont accordés sur une Déclaration politique négociée par l’Union européenne et le gouvernement britannique et approuvée lors du Conseil européen du 17 octobre 2019.
La Commission européenne a recommandé également le 17 octobre 2019 l’approbation par la Commission du protocole révisé concernant l’Irlande / l’Irlande du Nord inclus dans l’accord de retrait et de la Déclaration politique révisée établissant le cadre des relations futures entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, convenue au niveau des négociateurs.
Le Conseil européen a également adopté le 17 octobre 2019 des conclusions sur le Brexit. Il invite la Commission, le Parlement européen et le Conseil à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que l’accord puisse entrer en vigueur le 1er novembre 2019, afin de permettre un retrait ordonné.
Cette déclaration politique fixe le cadre des futures relations entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, convenu au niveau des négociateurs le 17 octobre 2019. Les dispositions initiales de cette déclaration qui définissent les bases d’une coopération précisent les termes de l’accord en matière de protection des données et de numérique.
1. Déclaration politique : quel impact sur la protection des données personnelles ?
Avec la révolution numérique, le monde est entré dans l’ère de l’information, nouvel or noir de l’économie. Internet et la numérisation des biens et services ont transformé l’économie mondiale en facilitant la circulation des données dans le monde. La circulation de la donnée est reconnue, par les experts autant que par les dirigeants d’entreprises et les autorités publiques, comme un facteur clé́ de la croissance de l’économie et de l’emploi.
La Chambre de Commerce Internationale (ICC) et McKinsey Global Institute ont d’ailleurs estimé en mars 2016 que les flux de données (informations, recherches, communications, transactions, vidéo, etc…) ont explosé, et ont été multipliés par quarante-cinq (45) sur les années 2004 à 2015 et qu’ils représentaient en 2016 pas moins de 10 % du PIB mondial.
La déclaration politique révisée du 17 octobre 2019 qui comporte des dispositions initiales relatives à la protection des données, prévoit que compte tenu de l’importance des flux de données et des échanges dans les relations futures, l’UE des 27 et la Grande Bretagne s’engagent à assurer un niveau élevé de protection des données à caractère personnel afin de faciliter ces flux entre elles.
Les négociateurs ont rappelé que les règles de l’Union en matière de protection des données fournissent un cadre permettant à la Commission européenne de reconnaître les normes d’un pays tiers en matière de protection des données comme offrant un niveau de protection adéquat, facilitant ainsi les transferts de données à caractère personnel vers ce pays tiers.
Impact à court terme pendant la période transitoire (du 31.10.2019 à la fin 2020)
La déclaration prévoit que la Commission européenne commencera les évaluations concernant le Royaume-Uni dès que possible après son retrait, en s’efforçant d’adopter des décisions d’ici fin 2020, si les conditions applicables sont remplies.
La Commission européenne pourra décider à l’issue de son évaluation, soit que le Royaume-Uni n’est pas un pays assurant un niveau de protection adéquat soit au contraire que le niveau de protection est adéquat sur la base d’une décision d’adéquation.
Pour sa part, la Déclaration politique rappelle que le Royaume-Uni établira son propre régime de transfert international. Le Royaume-Uni devrait prendre dans le même temps des mesures visant à faciliter, de manière comparable, le transfert de données à caractère personnel vers l’Union, le cas échéant.
Principe d’autonomie pour l’adoption de règles de protection des données personnelles
La déclaration politique prévoit que les relations futures n’affecteront pas l’autonomie des parties en ce qui concerne leurs règles de protection des données personnelles respectives. L’UE des 27 et la Grande Bretagne devraient également prendre des dispositions pour une coopération appropriée entre les régulateurs.
Votre entreprise est-elle concernée par le report du retrait du Royaume-Uni de l’UE ?
Dans le cadre de la préparation du retrait du Royaume-Uni de l’UE, votre entreprise est concernée si :
- elle transfère des données personnelles vers un responsable du traitement ou un sous-traitant au Royaume-Uni et que ce flux de données se poursuit au-delà de la date du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, soit après le 1er novembre 2019, compte tenu du délai nécessaire à la réalisation par la Commission européenne des évaluations concernant le Royaume-Uni, dès que possible après son retrait de l’Union européenne ;
- elle a conclu des contrats, toujours en vigueur avec des clients ou des fournisseurs installés au Royaume-Uni comportant des clauses de transfert de données ;
- elle reçoit des données personnelles de la part d’un responsable de traitement ou d’un sous-traitant installé au Royaume-Uni.
Lorsque la Commission européenne débutera son évaluation, à l’issue du retrait du Royaume-Uni de l’Europe pour évaluer le caractère adéquat du niveau de protection du Royaume-Uni, elle devrait prendre en considération la manière dont le Royaume-Uni respecte l’État de droit, garantit l’accès à la justice et observe les règles et normes internationales dans le domaine des droits de l’homme, ainsi que sa législation générale et sectorielle, y compris la législation sur la sécurité́ publique, la défense et la sécurité́ nationale ainsi que l’ordre public et le droit pénal (Considérant 105 du RGPD). La Commission tiendra également compte de critères clairs et objectifs, telles que les activités de traitement spécifiques et le champ d’application des normes juridiques applicables et de la législation en vigueur dans le pays tiers.
En l’absence de décision d’adéquation, le responsable du traitement ou le sous-traitant ne peut transférer des données à caractère personnel vers un pays tiers ou à une organisation internationale que s’il a prévu des garanties appropriées et à la condition que les personnes concernées disposent de droits opposables et de voies de droit effectives.
2. Déclaration politique : quel impact sur le numérique ?
Avec la numérisation croissante du commerce des services et les biens, la Déclaration politique prévoit que l’Union Européenne et le Royaume-Uni devraient établir des dispositions visant à faciliter le commerce électronique. Mais aussi, à éliminer les obstacles injustifiés au commerce par des moyens électroniques. Et enfin, d’assurer aux entreprises et aux consommateurs un environnement en ligne ouvert, sûr et digne de confiance.
Sur les services de confiance et d’authentification électroniques ou sur la nécessité de ne pas exiger d’autorisation préalable au seul motif que le service est fourni par voie électronique. Ces dispositions devraient également faciliter les flux de données transfrontaliers et répondre à des exigences non justifiées en matière de localisation des données, sachant que cette simplification n’affectera pas les règles de protection des données à caractère personnel des parties.
Les parties devraient prévoir, par le biais de dispositions sectorielles dans les services de télécommunication, un accès juste et équitable aux réseaux et services de télécommunication publics de leurs fournisseurs de services et lutter contre les pratiques anticoncurrentielles.
Les parties devraient travailler ensemble dans le cadre de forums multilatéraux et multipartites et établir un dialogue afin d’échanger des informations, des expériences et des meilleures pratiques en matière de technologies émergentes.
Rebondissement des députés opposés au Brexit avec l’amendement Letwin
Nonobstant l’accord sur le retrait du Royaume-Uni du 17 octobre 2019, c’était sans compter sur l’initiative des députés britanniques qui se sont réunis le 19 octobre dernier en session extraordinaire au Parlement britannique pour valider ou rejeter la nouvelle mouture de cet accord.
Un amendement déposé par le Député Oliver Letwin a été voté par 322 voix contre 306. Ce vote impose un nouveau report du vote relatif à la date définitive de retrait du Royaume-Uni de l’UE et l’injonction faite au Premier ministre de demander un nouveau report de trois mois de délai pouvant s’étaler jusqu’au 31 janvier 2020.
En effet, le texte adopté suite à l’amendement, reporte toute décision sur l’accord de retrait tant que les lois nécessaires à son application n’ont pas été étudiées et votées par le Parlement britannique.
Le Premier ministre pourrait être contraint par la justice à demander ce report. Par ailleurs, la Cour suprême d’Écosse, devra se prononcer afin de déterminer si le Premier ministre s’est bien conformé à la loi Benn (Benn Act ouEuropean Union (Withdrawal) (No. 2) Act 2019) lui imposant de demander un report du Brexit en l’absence d’un accord de retrait de l’UE adopté par le Parlement britannique.
Cette loi prévoit en effet qu’« En cas d’accord avec le Conseil européen sur la prolongation de la période prévue à l’article 50, paragraphe 3 du traité sur l’Union européenne, à 23 heures, le secrétaire d’État doit, avant le 30 novembre 2019, publier un rapport expliquant les progrès accomplis dans les négociations sur les relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne.
En outre, l’article 2 de la loi sur le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne prévoit également que « Le secrétaire d’État doit prendre des dispositions pour :
-
- a) une motion selon laquelle la Chambre des communes a approuvé le rapport, qui doit être présenté à la Chambre des communes par un ministre de la Couronne ; et
(b) une motion demandant à la Chambre des Lords de prendre note du rapport, qui sera présentée à la Chambre des Lords par un ministre de la Couronne.
(3) Les motions requises en vertu des paragraphes (2) a) et (2) b) doivent être présentées à la Chambre des communes par le ministre de la Couronne dans le délai de cinq jours civils à compter de la fin du jour où le rapport est publié.
(4) Si la motion déposée à la Chambre des communes est rejetée ou modifiée, le secrétaire d’État doit, au plus tard le 10 janvier 2020, publier un nouveau rapport en vertu du paragraphe (1) exposant un plan pour la poursuite des négociations sur les relations du Royaume-Uni avec l’Union européenne.
(5) Le secrétaire d’État présente un nouveau rapport (en vertu du paragraphe (1)) au moins tous les 28 jours civils à compter du 7 février 2020, soit jusqu’à la conclusion d’un accord avec l’Union européenne, soit jusqu’à ce que la Chambre des communes en décide autrement. »
Pour en savoir plus :
Déclaration politique révisée du 17 octobre 2019.
Lettre du président Jean-Claude Juncker au président Donald Tusk
UK Parliament, House of Lords, Amendment Letwin.
European Union (Withdrawal) (No. 2) Act 2019
Par Didier Gazagne, le 20.10.2019
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